mercredi 23 janvier 2013

De l'influence positive de l'air breton sur le calembour ou Pourquoi doit-on dire chocolatine plutot que pain au chocolat



M. Betty, il dit toujours : « Finalement, la France quand on y pense, c’est un petit pays coincé entre la Belgique et la Bretagne ». Rassure-toi, toi qui me lis, il n’est rien arrivé à Gaby, c’est juste que je suis allé me perdre du côté Saint-Brieuc, et que du coup j’ai changé de copain de comptoir, juste pour voir.
Alors je vais te dire, je ne comprends pas pourquoi le bouquin « Cinquante nuances de gris » a un tel succès, parce que finalement il suffit de faire un tour en Bretagne pour en découvrir beaucoup plus. Cela dit, ce n’est pas tellement que le froid m’a gêné. Faut dire que je suis d‘origine portugaise et que là-bas, on peut le dire, les Ibères sont rudes.
Les gens du nord, qui ont dans leurs yeux le bleu qui manque à leur décor, sous leurs airs austères et leurs mutismes, sont très accueillants après un court examen. Comme dit M. Betty : « Le respect de la Bretagne ne s’octroie pas, il se gagne ». Essentiellement après quelques verres. Là-bas, un verre, ça va, mais trois verres, ça va, ça va, ça va bien mieux. Comme dit M. Betty : « La bière est la preuve que Dieu existe et qu’il nous aime ». Et je t’assure que là-bas, sur ce genre de truc, ils sont plutôt bigots.
Malgré tout, une chose me chiffonne. Ils disent pain au chocolat au lieu de chocolatine. Et depuis que le pain au chocolat est devenu un argument en faveur de l’identité nationale (doux euphémisme pour racisme ordinaire), j’ai ce mot en horreur. Que veux-tu, je préfère donner à ma viennoiserie un nom qui au moins a le mérite de ne pas pousser au patriotisme.
Attention, ne me fait pas dire ce que je n’ai pas dit. Je ne suis pas régionaliste. Je ne suis pas un de ces imbéciles heureux qui sont nés quelque part. Non ! Mais, j’aime que la langue française se colore, s'enrichisse de mille patois, de mille langues. Que l’identité nationale soit multiple, pour que chacun s’y reconnaisse ! Que le pays ne soit plus un et indivisible, mais toute en nuance comme le ciel de Bretagne. On appellerait ça les frances, en minuscule pour nous ôter la folie des grandeurs qui nous consument. On y puiserait nos racines, un peu partout, de la mondialisation à taille humaine. On supprimerait les frontières et les querelles de clocher puisqu’on pourrait aimer librement son pays et celui des autres de la même façon. On aurait plus le moindre souci concernant sa culture, sa langue, sa religion, ou son orientation sexuelle. À ce propos M. Betty, il dit souvent « je préfère rendre un homme gay qu’une femme triste ».
Et sur ça je suis tout à fait d’accord avec lui. Faut dire que quand j’ai bu, je suis amoureux du monde entier. Je dois avoir un cœur à la place du foie. Que te dire, j’aime les poulettes basquaises, les filles savoyardes me font fondre, j’aimerais consoler la Paimpolaise marrie et amère, qui attends le retour de son mari marin parti en mer. La Briochine m’invite à la gourmandise . Enfin, comme dit M.Betty " La bretonne ne se prends pas, elle se donne". Je n'oserai pas vous avouer que la Biterroise réveille en moi des envies de Béziers. Cela dit j’arrête, ça ne vous intéresse surement pas comme dit M. Betty, « Le sujet du sexe, je ne sais pas si ça touche beaucoup d’entre vous, mais ça touche beaucoup d’entre moi »
Mais sachez qu’en ces temps de guerre, religieuse, économique, militaire et sociale, je préfère glisser ma peau sous des draps chauds, que de la risquer sous les drapeaux. Et pour éviter toutes controverses, au petit matin, j’irai chercher des croissants…

samedi 5 janvier 2013

Lettre Ouverte Aux Quarante Z’immortels De L’Académie D’Françoise




            Je me permets de tutoyer, parce que le voussoiement c’est pas ma tasse de thé, et pour être franchement honnête, le thé non plus. Tu me pardonneras si je te parle franco, mais j’ai pas de porte de derrière d’après Madrid (Madrid, c’est un copain du bistrot qui vient de Montréal). T’auras noté que je t’es mis des majuscules partout dans le titre, j’me suis dit que ça te ferait plaisir, je regarde pas à la dépense même si — prends pas ça personnel — j’suis comme qui dirais plutôt contre le, la et les capital — va donc savoir comment je terminaisonne un mot dans ce cas-là —. J’ai préféré t’écrire plutôt que de te rendre visite parce que j’aime pas tellement être interrompu quand je parle, en plus, vu ce que je vais te demander, tu vas surement vouloir m’assommer un avis, et ça risque de me gêner au vu de l’argumentaire qui suit succédament. En plus, quand j’ai le soliloquet qui me prend, la bafouille c’est autrement plus efficace pour faire passer que de se mettre un pousse-moulin derrière la cravate.
            Ma femme, c’est à cause d’elle que je te gribouille. Elle m’a dit qu’elle en avait sa claque que j’ai pas d’ambition et que je soyes chtarbé. Et puis, elle m’a jeté dehors, ce qui est un peu cave quand t’y penses parce qu’on peut pas dire que ça va m’aider d’avoir une case en moins. Mais bon, puisque j’avais un grain, je me suis dit qu’il fallait le semer. Le blème tu vois, c’est que je savais pas trop où.
            J’ai demandé au Pape — pas le vrai, t’es con, le Pape, c’est un copain de bistrot qu’a pris l’habitude, va savoir pourquoi, de baptiser son calva – qui m’a donné quelques idées dans ma suite, tu vois. Il m’a dit de m’essayer à la religion, comme quoi y aurait ces derniers temps un regain d’intérêt, et que c’est un secteur qu’est pas en crise. Perso, j’ai rien contre notre Dab, qui êtes aux cieux, mais j’ai, comme qui dirait, l’orthodoxie qui a la sciatique.
L’artilleur — un autre copain qu’on appelle  comme ça, vu les canons qu’il enchaine — il m’a bien plu. Il m’a parlé de philo. Le problème de la philo, c’est pas tellement pour les concepts, moi-même je fais dans l’épicurisme pratiquant; mais à la louche, un philosophe, niveau honneur et tout le barda, c’est pas le Pérou, faut attendre le passage de la faucheuse. Et ça va te sembler sans doute naïf, mais moi, vivre, j’aime bien ça. C’est pas que je sois immunisé contre la saudade et le blues, mais ça me ferait mal de pas savoir comment ça va finir. Qu’est-ce que tu veux ? Je suis pas pressé d’aller crécher boulevard des allongés.
            Owen – c’est un autre copain de bistrot, un black marrant qu’on appelle Owen Zescene, parce que c’est un négro spirituel – m’a dit que puisque j’étais bourré de vie et que j’avais pas d’ambition, il fallait juste que je change de cuite. Il voulait que je goute à l’ivresse du pouvoir, et pourquoi pas devenir président. Mais d’abord, on en a déjà un, et ça me la foutrait mal d’aller piquer le job d’un gars qui m’a rien demandé, pas même ma voix, et pis en plus, je crois que dans ce taf, au pire, donc au bas mal, tu subis pas mal la pression. Allez pas croire que je suis un Lampe-à-mort, mais un boulot où ta pression, tu peux même pas la boire, franchement…
            Et pis j’ai entendu dans le dévidoir à jactance que chez vous il y avait de la place. Cinq en plus. Alors, franchement « immortel », c’est tout à fait ce qu’il me faut. Pour s’appeler comme ça, faut vraiment rêver en couleur. C’est tout moi. Et ça conviendrait tout à fait à la patronne. Fou et au sommet, moi, je veux bien. Donc, si ça vous cause pas trop de tort, je veux bien devenir académicien. J’ai pas vraiment une grande-gueule, je suis honnête au turbin, je maîtrise l’imparfait du subjonctif perfecto ; je vous jure que je vous conte pas des craques, même si pour le prouver, encore aurait ’il fallut que vous me vissiez sur mon comptoir en train déclamer du Proust – je t’assure, qu’y en a qu’on chialé comme des madeleines- et que vous entendissiez la prose que je jactais devant la lourde de ma blonde.
En plus, vous avez une chouette mission de conversation du patrimoine linguistoc. Avec moi je te rassure, t’es servi. Bon je suis pas vraiment moine et pas franchement ému par l’amère patrie, mais linguistique, j’assure, je parle au moins 4 langues : le patois, le charabia, le louchebem et le javanais. Pis avec tous les copains du bistrot, avec un peu de chance, on peut t’en faire du dictionnaire à la française de l’oncle DOM-TOM. « Moun sou pa ka jen tonbé si jandab » comme dit la 7e compagnie – un autre copain, qu’on appelle comme ça vu qu’il est créole-.
            Je crois, en plus, que vous auriez tout intérêt à m’embaucher, parce que c’est pas pour dire, mais pour des gens siphonnés du carafon, j’en ai connu des plus fendards. Je veux dire, j’ai ligoté un pavé d’Ormesson, il y avait de quoi s’endormir. Nan, c’est vrai quoi, la langue, que ça se préserve, que ça se listenigue, que ça s’empile dans les dicos, qu’elle se fasse belle pour robert et sa rousse, j’y vois pas d’mal.
            Mais quand t’as comme moi, la folle du logis qui t’astique les mandibules, faut croire que les mots figés, c’est pas mon turc. Oh ! Ce n’est pas que j’ai la cervelle en forme de sifflet, mais je crois que je suis suffisamment loufoque, pour me libérer des carcans cons. Mes mots à moi, je te les cueille sauvage, sur le bord de la route, en lousedé. Je les chipe entre les pages des livres, que je dévore comme casse-dalle quotidien. J’ingurgite tout et n’importe quoi, préface, post face, prétexte et tout. Les Vlad et Mécum, le reader indigeste, l’almanach des verts mots. J’ai la littérature internationale, J’ai rêvé auprès de la nana Karenine qu’aurait mieux fait d’épouser son julot Pierre, j’ai parcouru l’Amérique avec Kerouac, j’ai même fait la craie en bas de chez moi. J’ai compati avec La Bovary qui dormait debout. Comme Don Quichotte, j’ai fait la manche, et je me suis vu en haut de Notre-Dame pour écrire « Ananke ». Tu vois, Victor –ou Hugo, je me rappelle jamais de son prénom- il avait tout compris. Lui, j’emporte ses poèmes quand je vais aux waters-cosettes. Moi, j’ai vraiment pas la goutte à l’imaginative.
Ma souris, elle les aime comme ça les mots, même pas en bouquet, juste plein ma bouche. Je suis mordu moi, de ma môme, c’est pour ça que tu m’arrangeras bien le coup si tu m’acceptais dans ton Aca et demi. Pour te dire, Marguerite, la première fois qu’elle s’est effeuillée, ça s’est arrêté sur « à la folie ». Et ça m’est jamais passé. Une gadji comme ça, j’aurais voulu lui refiler des rivières de diam’s et des bagouzes à chaque doigt.
Sauf qu’elle en a marre de me voir trimarder, et qu’j’ai que dalle de mornifle à lui ramener le soir. Pourtant, j’ai boulonné sévère, façon syndrome de Sisyphe, j’ai pas épargné ma peine. Mais avec la crise, tout ça, le boulot se fait rare. Alors, pour toucher un peu au grisbi, je me suis dit qu’à la Cadémie des fraises, dois-y avoir un sacré pactole, vu comme vous êtes fringué. Pas du tout as de pique, si tu veux mon avis.
Peut-être t’aimerais en savoir un peu plus sur mon curriculum Vittel. J’ai beaucoup travaillé dans le zinc – la ferraille, s’entends hein ! — à la suite de quoi, j’ai un peu fait la commode pour des zigues à moi, mais ça a pas duré. J’ai répugné à rentrer dans la Grive, parce ce que tiens pas vraiment à refroidir des mecs à la lampe à souder, ou à me faire dézinguer. Comme j’ai dit au-dessus, je tiens pas encore à finir dans une boite à violons. Je connais quelques keums, qui font dans la cambriole, mais monte en l’air, ça m’attire pas. Tant qu'à faire de délourder les gens, je préfère faire ça honnête, tu vois.. Donc depuis, je fais la java en attendant de retourner au chagrin.
            J’aimerais savoir aussi si chez vous, on peut tirer sur le mégot. Faut dire que le gris, c’est un peu mon vice. Rassure toi, j’ai pas de versa. Je sais que j’ai pas vraiment la cervelle bien rejetée en arrière, mais je suis pas le mauvais bougre, et je mets du cœur à l’ouvrage. Surtout en tant que bouquineur.
            Je pense que je t’ai tout dit, si t’as des questions, tu peux me joindre entre douze et quatorze au café de l’hôtel de ville.

Par cette présente qui te souligne mon absence, tu peux prendre acte de ma candide rature.
Mais tarde pas à répondre, j’ai aussi demandé à tes collègues de chez… et honnêtement, j’irai chez le premier qui me dira oui, rapport à ma femme, que j’aimerais bien aller retrouver.

Viens donc prendre à l’occase, une eau de savon ou un tango, c’est moi qui paye la douloureuse.

Didier dit Sourire-de-la-veuve (parce qu’il paraît que j’ai la langue bien pendue)

Pause Scrotum : Et si jamais, dans votre prochaine réunion là, vous pourriez peut être évoquer la préservation du point-virgule, pas vraiment que moi je m’en serve beaucoup, mais j’ai l’impression qu’il est en voie de disparition, cette espèce-là. Faudrait voir à s’en occuper. Enfin,  j’dis ça, j’dis rien…

mardi 1 janvier 2013

Du bonheur de travailler le soir de la Saint-Sylvestre



Mon pote Gaby, il dit toujours : « Je suis beaucoup trop payé pour ce que je fais, mais pas assez pour ce que je m’emmerde ». Et là, tu vois, je trouve qu’il a raison Gaby. Surtout que pour une fois, c’est moi qui suis au taf. En même, temps, ça me plait de travailler le soir de la Saint-Sylvestre. Ça m’évite tout le folklore consensuel d’une date dont on a oublié la signification.
Allez pas dire que je sois cynique, hein ! Après tout, ce soir, je fais des efforts. Je veux dire, franchement, ça me manque pas moi, les embrassades embarrassées sous le gui, à grand renfort de « Bonne Année !!!!! » alors qu’on à toutes les raisons de penser que ce ne sera pas le cas. En plus, c'est juste pour la tradition, et moi, je vais te dire, je suis pas superstitieux, ça porte malheur.
Les accolades calamiteuses, les baisers forcés, les congratulations incongrues. Et chacun y allant de son petit commentaire : « Alors pour l’année prochaine tu prévois quoi ? Et quelles sont tes résolutions pour l’avenir ? » Mes résolutions, je vais te le dire, c’est comme dit Gaby : « La vie m’aura servi de leçon. Je ne recommencerai plus ». Et pof
Faut m’excuser, je m’emporte, je m’emporte et tu vas finir par me prendre pour un sociopathe. Ce en quoi tu n’aurais pas complètement tort malgré le fait que tu ne me donnes pas raison. Comme dit Gaby : « Au royaume des aveugles, les borgnes sont mal vus ».
Je veux bien mesurer mon propos, mais je n’ai pas trouvé d’outils à ma convenance. Franchement, tu trouves ça normal, toi, que, en commençant cette nouvelle année, la misère, le doute, l’angoisse, la peur soient mes sentiments les plus forts. Alors, bien sûr, je parle que pour moi, et vous n’êtes, sans doute pas d’accord. N’empêche, que ça aurait pu être pire, j’aurais pu verser dans l’obscurantisme. Heureusement, je suis athée, Dieu merci.
Bon, allez, pour pas te faire de la peine, on va dire que j’ai tort, que le monde n’est pas si pourri. Et surtout, qu’il faut continuer à se battre. Car comme dit Gaby : « En essayant continuellement on finit par réussir. Donc : plus ça rate, plus on a de chance que ça marche. »
Et moi, c’est promis, je vais essayer un peu l’espoir, histoire de voir ce que ça fait. Tiens, c’est bien simple, je vais entrer dans cette année du bon pied. Même que ce sera le pied gauche, il paraît que ça porte bonheur…