mercredi 19 juin 2013

Ressurection apocryphe


Lazare, gisant dans son tombeau
Trois coups

JÉSUS (OFF) : Lazare, debout. Le monde frappe à ta porte.
LAZARE : Oh, 5 minutes, j’ai encore sommeil.

Silence. Trois coups à nouveau

JÉSUS (OFF) : Lazare, t’as entendu ce que je t’ai dit. Debout, voyons. Le monde t’attend.
LAZARE : dis-lui que je suis pas là, que je suis malade, que je suis désolé, mais que là, ça va pas être possible.
JESUS (OFF) : Allons Lazare, ne fais pas l’enfant. Lève-toi, voyons !
LAZARE : s’agite dans son lit Non, mais c’est pas vrai à la fin, On peut plus reposer en paix sans qu’un crétin, vienne vous ressusciter pour épater les foules. T’es bien gentil, Jésus, mais c’est pas parce que t’es le fils du propriétaire que tu peux tout te permettre.
JÉSUS (OFF) : Bon, Lazare, ça suffit maintenant, lève-toi et plus vite que ça. Sors de ton tombeau qu’on crie « Alléluia »
LAZARE : Et puis quoi encore. Tu veux pas aller trouver un autre guignol à ressusciter. Tiens, si je me souviens bien, David de Bethléem, est mort un peu avant moi. Lui, ça lui plaira surement qu’on vienne le ressusciter, il a toujours aimé être exposé à la foule, ce tombeur.
JÉSUS : Entrant dans le tombeau Ah merde, David est mort
LAZARE : Je crois qu’il s’est fait renverser par un chariot en revenant de Jérusalem. Il venait de fêter ses 33 ans
JÉSUS Putain, c’est jeune quand même
LAZARE Oui, on est peu de chose…
Silence
JÉSUS Bon, on fait quoi là, maintenant ? J’ai une foule dehors, qui attend un miracle. Et toi, tu rechignes. Tu ne voudrais pas faire un effort ? Pour moi ?
LAZARE Laisse tomber, Jésus. Et c’est pas la peine de dire que ça ferait plaisir à Marthe et à Marie, je culpabilise assez comme ça.
JESUS Mais je comprends pas pourquoi tu ne veux pas ressusciter.
LAZARE Ca fait trop mal
JÉSUS Elle est pas belle la vie ?
LAZARE C’est pas ça. Je veux dire, oui c’est sûr, ça me ferait plaisir de refaire le con avec les copains, de revoir la Galilée, et de boire un coup avec toi la prochaine fois que tu changeras l’eau en vin.
JESUS Ben alors, sors avec moi
LAZARE Je suis bien ici, c’est calme. Certes, je ne fais pas grand-chose, n’empêche, c’est reposant. Pis surtout, je suis pas obligé de me coltiner les hommes toutes la journée
JÉSUS : Allons Lazare, ne parle pas comme ça, tu sais bien qu’il faut s’aimer les uns les autres. Nous sommes tous enfants de Dieu, et papa est amour.
LAZARE : Parlons en tiens, de Papa est amour. Ah il a dû drôlement les aimés, ses enfant de Sodome et Gomorrhe avant de les carboniser avec le feu du ciel.
JÉSUS : Un père est bien obligé d’apprendre à ses enfants à bien se comporter
LAZARE : Ben permets moi de penser que le déluge, c’est quand même une drôle de méthode d’éducation .Tu trouves ça normal toi, pour un père qui dit aimer ses enfants, qu’il y est  tant d’injustice, tant de misère et de violence. Il aime tous les hommes peut-être, mais il a quand même ses préférés.
JÉSUS : Il a laissé à l’homme le libre arbitre, comme preuve de son amour.
LAZARE : Aux chiottes, le libre arbitre. Tu peux m’expliquer de quoi on est libre exactement. De choisir dans quel travail on va aller se faire exploiter ? Dans quel taudis on va aller vivre ? Aux caprices de quel roi nous allons nous soumettre ? Au bord de quel cœur, on va aller s’humilier ? À quel arbre nous allons nous pendre ?
JÉSUS : T’exagères.
LAZARE : Bien sûr que j’exagère. Mais Jésus, tu ne gagneras pas. Hier tu as chassé les marchands du temple, aujourd’hui ils sont deux fois plus nombreux. La lapidation continue et ils sont nombreux à vouloir te jeter la première pierre. Et après tu ne comprends pas pourquoi je ne veux pas sortir. Moi je ne comprends pas pourquoi tu ne veux pas rester.
JÉSUS : Parce que je le dois. Entre nous, ce boulot de messie, c’est pas une sinécure. Tout un tas de cons, qui comprennent mes paroles à l’envers. Je leur dis « exploiter vos talents » et ils pensent qu’il s’agit de la monnaie…
LAZARE Tu vois, Jésus, entre nous les hommes sont finis. Reste là, reste avec moi. On est bien tous les deux.  Et Puis on va pouvoir dormir…enfin dormir…
Lazare s’endort .Silence
JÉSUS : Mais qu’est-ce que je vais dire à mon père ?
Noir

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